Source:
http://carredinfo.fr
Dimanche
24 mars au matin, Eyek Awantchok, Camerounais de 34 ans, a été
reconduit vers le Cameroun, son pays alors qu’il s’apprêtait à
passer devant le juge. Le titre de séjour de ce père de famille n’a
pas été renouvelé suite à une affaire familiale. Son employeur a
alerté les autorités, en vain. Il raconte des conditions
d’arrestation et de rétention « humiliantes ».
Bosseur
et
intégré
Eyek,
camerounais
de
34
ans,
se
trouve
au
centre
de
rétention
de
Cornebarrieu
depuis
près
d’un
mois.
En
décembre
dernier
la
préfecture
n’a
pas
renouvelé
son
titre
de
séjour.
Il
se
trouve
donc
en
situation
irrégulière
et
impossible
pour
lui
de
travailler.
L’homme
a
entamé
au
début
de
sa
rétention
une
grève
de
la
faim
et
affirme
au
téléphone
voir
perdu
près
de
quinze
kilos.
«Quand
je
l’ai
vu
dans
cet
état,
cela
m’a
fait
vraiment
de
la
peine»,
affirme
Elsa,
son
ancien
employeur
d’une
agence
d’intérim
qui
a
dû
cessé
de
faire
appel
à
ce
peintre
en
bâtiment
depuis
qu’il
n’a
plus
de
papier.
C’est
la
première
fois
qu’elle
se
bat
pour
défendre
un
ancien
employé.
«
On
a
souvent
des
problèmes
avec
les
intérimaires,
certains
ne
sont
là
que
pour
les
aides
mais
Eyek
est
carré,
bosseur
et
il
s’est
parfaitement
intégré
»,
assure-t-elle.
«
Je
ne
défends
pas
une
cause,
je
le
défends
lui.
Je
peux
comprendre
les
renvois,
qu’il
soit
difficile
d’accueillir
tout
le
monde
mais
pour
lui
je
ne
comprends
pas.
Il
s’est
parfaitement
intégré,
il
aime
la
France,
il
a
sa
fille
ici,
pour
moi
il
est
Français.
»
Elsa
a
découvert
dans
la
presse
sa
présence
à
Cornebarrieu.
Elle
a
alors
appelé
la
préfecture,
la
mairie
de
Toulouse,
la
Cimade
pour
tenter
d’éviter
qu’il
ne
soit
expulsé
vers
le
Cameroun.
«
Je
ne
défends
pas
une
cause,
je
le
défends
lui,
poursuit-elle.
Je
peux
comprendre
les
renvois,
qu’il
soit
difficile
d’accueillir
tout
le
monde
mais
pour
lui
je
ne
comprends
pas.
Il
s’est
parfaitement
intégré,
il
aime
la
France,
il
a
sa
fille
ici,
pour
moi
il
est
Français.»
Un
divorce
qui
met
fin
au
droit
de
séjour
Eyek
Anwantchok dit être arrivé en
France en 2003. En 2005 il se
marie et est aujourd’hui papa d’une petite fille de 6 ans. En
2010 le divorce est prononcé ainsi que la garde partagée de
l’enfant. « De
janvier à
mars 2011
j’ai dû
retourner au
Cameroun (où
se trouve
encore sa
mère NDLR).
J’ai
prévenu la
mère de ma
fille et je
me suis
arrangé avec
elle concernant
la garde. A
mon retour,
elle avait
fait un
recours pour
dénoncer mon
absence et
dire que je
ne m’occupais
pas de mon
enfant »,
affirme-t-il. Le jugement en appel lui a finalement accordé un droit
de visite. C’est ce motif que la préfecture aurait mis en avant
selon lui pour refuser la prolongation de son titre de séjour. Eyek
ne comprend pas. «J’ai toujours
travaillé, j’ai montré
toutes mes fiches de
paye, j’ai un
appartement… J’ai
montré tout ça mais
ils ne veulent rien
entendre », lâche-t-il.
«
Un
camp
de
torture
»
Joint
au téléphone samedi 23 mars, l’homme raconte son arrestation et
sa rétention qu’il qualifie de «camp de torture». « J’ai été
arrêté alors que je circulais en voiture. C’était très musclé,
on m’a plaqué au sol, ils m’ont fait mal et ça m’a
traumatisé. Au centre de rétention on nous traite de ‘chiens’,
on nous dit ‘vous sentez mauvais’. C’est une humiliation. »
«Ils
m’ont
menotté,
ligoté
et
mis
un
casque
de
boxeur
sur
la
tête.
Dans
l’avion
j’ai
crié.»
Le
19
mars
dernier,
il
a
été
embarqué
dans
un
avion
pour
le
Cameroun.
«On
m’a
réveillé
à
4
heures
du
matin,
sans
me
prévenir
auparavant.
En
raison
de
ma
grève
de
la
faim
je
suis
classé
en
‘situation
sensible’
et
les
policiers
disent
qu’ils
n’ont
pas
à
me
prévenir.
Ils
m’ont
menotté,
ligoté
et
mis
un
casque
de
boxeur
sur
la
tête.
Dans
l’avion
j’ai
crié.
Les
policiers
me
tenaient
à
la
gorge
et
me
donnait
des
coups
de
poing
dans
le
ventre
»,
raconte-t-il.
L’expulsion
n’aura
finalement
pas
lieu,
le
pilote
demandant
à
ce
qu’il
soit
descendu
pour
pouvoir
décoller.
«On
m’a
dit
que
j’avais
eu
de
la
chance
de
tomber
sur
un
‘gauchiste’.
»Reprendre
des
forces
pour
de
nouveau
crier
Ce
lundi 25 mars, Eyek doit être selon la procédure présenté à
nouveau devant un juge. Mais il a toujours peur d’être expulsé.
La veille même, il confiait : « A tout moment ils peuvent venir. Si
je dois retourner là-bas, je ne sais pas ce que je vais faire. Je
n’ai pas de maison, pas même de chambre chez ma mère. Ma fille
est ici. Ce n’est pas possible de faire ma vie là-bas». Quand
elle est allée lui rendre visite, Elsa son ancien employeur dit lui
avoir apporté des gâteaux et du jus de fruits. « Pour qu’il
reprenne des forces et qu’il puisse à nouveau crier dans l’avion
et que le pilote refuse de l’embarquer. S’il est trop faible,
c’est sûr il va partir.»
Un
cas
classique
Selon
son ancien employeur et la Cimade, Eyek Anwatchok
a été finalement expulsé dimanche 24 mars
au matin. « Selon ses compagnons de chambre cela s’est bien passé
au centre de rétention. Mais beaucoup moins à l’aéroport où il
aurait reçu des coups après avoir résisté», explique Lionel
Claus de la Cimade. Selon le militant de la Cimade, Eyek a fait part
de sa volonté d’effectuer une visite médicale à son arrivée au
Cameroun.
Son
cas est selon lui «malheureusement un grand
classique» , la rupture de vie commune est « très
souvent utilisée» pour refuser une prolongation d’un titre de
séjour. «Dans les faits on se rend compte qu’il y a comme une
période probatoire de deux ans et s’il y a une rupture de vie
commune, la personne perd quasiment tous ses droits. Elle n’a pas
le droit au divorce et finalement il vaut mieux pour elle rester en
couple même si elle ne s’entend plus avec le conjoint» , affirme
Lionel Claus. La prolongation de rétention devait être décidée
devant le juge des libertés ce lundi 25 mars. Pour lui, «ce n’est
pas fortuit».
Contactée,
la préfecture de Haute-Garonne n’a pas donné suite à notre
sollicitation.
Par Bertrand
Enjalbal,
carreinfo.fr, 25 mars 2013
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