L’immigration coûte-t-elle entre 70 milliards et 80 milliards d’euros par an?
Votre question
Bonjour,
Nous avons reformulé votre question qui était initialement : «Cette
affirmation est elle exacte : en France et en 2006, l’immigration nous
coûtait entre 70 milliards et 80 milliards d’euro par an»
Cette réponse repose en partie sur un article publié dans la rubrique Désintox de Libération en 2013.
La question du "coût de l'immigration" est complexe à plusieurs
titre, ce qui explique que circule à son propos des estimations
particulièrement variables, et pas toujours très sérieuses..
De 24 milliards... à 80 milliards, voire 164 milliards
En évoquant un montant de 70 à 80 milliards par an, vous faites
référence à des données qui circulent depuis longtemps, et qui ont
parfois été citées par Marine Le Pen, par exemple. Des données qu'on
retrouvait il y a quelques jours sur le site Dreuz. Voilà d'où elles proviennent:
En 2006, les économistes Yves-Marie Laulan et Jacques Bichot produisent une courte note sur le sujet du coût de l'immigration. En
quinze pages, ils aboutissent à une estimation de 24 milliards. A quoi
sont ensuite ajoutés 12 milliards - non détaillés - au titre de «l’intégration». Cela fait 36 milliards : le rapport s’arrête là. Mais en 2011, dans une interview pour Monde & Vie, Yves-Marie Laulan lance, sans guère plus de précisions : «Les experts qui ont travaillé à cette étude pensent qu’il faut doubler [ce montant].» Et voilà comment on est passé de 24 milliards à 70 ou 80.
Cette inflation brutale, de 24 à 80 milliards, incite à la plus grande prudence quant au sérieux de ce chiffrage.
A noter que Dreuz, dans son article daté d'il y a deux jours, se base
sur ce montant de 70 à 80 milliards pour le doubler à nouveau, et
affirmer que le montant actuel est de 164 milliards par an. Comment?
Simplement en décrétant que ce montant augmente de 10% par an. Et
toujours sans aucune justification.
Nous pouvons estimer son coût, à raison de 10% supplémentaires par année, à 164 milliards, compte non tenu de l’afflux de tous ces illégaux qui envahissent notre territoire et ceux « légaux » que nos gouvernements font entrer au nombre de 300 ou 400 mille, chaque année. Ce sont, bien entendu, 164 milliards, à la charge du contribuable français. Mais les chefs de l’État, tous, refusent obstinément de dévoiler les chiffres réels.
C'est quoi, le "coût de l'immigration?"
Au delà de ce tour de passe passe consistant à multiplier par deux le
montant initial calculé, cette étude (comme toutes celles sur
l'immigration) repose sur des bases arbitraires, et donc contestables.
Par exemple, l'étude estime que l'éducation est un des pans les plus
coûteux (près de 10 milliards d'euros) de l'immigration du fait de la
scolarité des enfants d'immigrés. Ce qui revient à compter comme coût de
l'immigration des dépenses liées aux enfants d'immigrés.
Lorsque l’on cherche à chiffrer le coût de l’immigration, le tout est
justement de savoir ce que l’on chiffre. Il y a des évidences : comme
tout un chacun, les immigrés coûtent en dépenses de santé, en retraites,
en allocations, mais ils rapportent en cotisations sociales, impôts,
TVA… Restent les coûts indirects, qui ouvrent la porte aux
interprétations les plus diverses et aux choix les plus arbitraires.
Quelle part des dépenses de sécurité ou d’éducation leur est imputable ?
Faut-il prendre en compte leurs enfants (et pourquoi pas, alors, les
enfants de leurs enfant)? Un enfant né d'un couple mixte (un parent
immigré et un parent né en France) doit-il être «comptabilisé»? Si on
mesure le coût indirect, comment mesurer les bénéfices indirects? Etc.
Les différences de chiffrage entre les différentes études tiennent
essentiellement -outre aux sérieux des calculs- aux périmètres retenus.
Quand une étude de chercheurs lillois (aboutissant à l'idée que l'immigration est positive sur le plan économique à hauteur de 4 milliards d'euros pour l'année 2006) estiment à 47,9 milliards les dépenses de l’Etat en faveur des immigrés, l'auteur d'une autre étude pour contribuables associés (aboutissant
à un coût de l'immigration de 17 milliards d'euros par an), Jean-Paul
Gourévitch compte lui deux fois plus (89,4 milliards) en rajoutant à
l’ardoise les «coûts sécuritaires», et en incluant les enfants nés en
France.
Bref, personne ne calcule la même chose.
L'analyse de l'OCDE
En 2013, l’OCDE a rendu public une étude qui repose aussi sur des
choix (se bornant au seul impact fiscal des immigrés) mais qui
a l'avantage d'appliquer le même calcul à l'ensemble des pays. Selon
l'étude, l'impact fiscal due l'immigration, au sein de ses pays membres
de l'OCDE, n’est que très rarement supérieur à 2% du PIB. Car même si
les ménages immigrés touchent plus d’avantages sociaux que ceux nés dans
le pays, leur «structure par âge [est] plus favorable» : en
clair, les immigrés sont davantage concentrés dans la tranche d’âge
25-54 ans que les autochtones, donc ils cotisent plus et ont, par
exemple, moins de dépenses de santé que la moyenne. Et si la France a,
selon l’OCDE, un impact de - 0,52% du PIB (environ 10 milliards
d’euros), c’est parce que ce constat y est moins vrai : l’immigration y
est plus ancienne, ce qui creuse les dépenses de retraites.
En résumé : il n'existe aucun chiffre incontestable sur le coût de
l'immigration. Les résultats des différentes études varient selon ce que
chacune retiendra dans son calcul. Il existe autant de méthodologies
que d'enquêtes. Toutefois, le montant de 70 à 80 milliards que vous
évoquez (qui correspond de très loin à l'estimation la plus haute parmi
les études sur le sujet) ne semble pas très sérieux, puisqu'il se base
sur une étude ayant préalablement chiffré à 35 milliards le coût de
l'immigration avant que ce montant soit doublé subitement sans aucune
précision.
Cordialement
C.Mt
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