vendredi 10 janvier 2014

"La République a gagné", mais quelle "République" Monsieur Le Ministre?


 

Celle essentiellement court-termiste; ou l’Autre qui fut enseignée notamment aux filles et fils des indigènes venus des anciennes colonies françaises, comme étant au-dessus des considérations personnelles, politiciennes, identitaires, voire communautaires?

Et au risque de subir aussi un bannissement politique, dans cette chasse aux sorcières qui ne dit pas son nom, et qui tendrait à tous nous assimiler à des soutiens de MBALA MBALA (pour lequel je n’éprouve la moindre sympathie et condamne les pitreries antisémites)…il serait plus juste de dire que nous avons assisté Jeudi 09 Janvier 2014 à la régression de l’État de Droit dans cette France voulue des Libertés et des Droit de l’Homme.

C’est en effet la première fois de triste mémoire qu’en un temps record (approximativement trois ou quatre heures), la plus haute juridiction administrative de ce pays a pu être saisie, puis rendre une décision, contraire à celle qui venait d’être soutenue au Tribunal administratif de Nantes. Cette république française (la nôtre aussi) était-elle donc si en danger, si menacée par un homme dépeint en «diable noir», pour souiller à jamais ses principes fondamentaux; ceux-là mêmes avec lesquels nous essayons péniblement d’extirper certains de nos compatriotes (sans réelle fermeté des autorités françaises) des geôles d’un tyran au Cameroun (pays d’origine, faut-il le rappeler, du père de Dieudonné MBALA MBALA)?

Qui peut sérieusement le croire?

L’on se serait parfois cru en 1945, au soir et au lendemain de la libération de la France de l’occupation Nazie. Pourtant l’antisémitisme, le racisme, ou les discriminations au faciès…nombre d’entre-nous les subissons et les combattons au quotidien; et ne pouvons imaginer un seul instant qu’un homme politique, membre du parti socialiste, devenu ministre de l’intérieur… qui a eu à se plaindre en d’autres temps et d’autre lieu de ne pas voir assez de «blancos» dans sa commune, ou perpétue la politique du chiffre en matière des expulsions des étrangers…puisse devenir notre «Guide Suprême».

Car des «Guides suprêmes» nous en connaissons quelques uns dans nos histoires respectives, suffisamment rompus à l’art de «l’escamotage», pour ne pas dire de «l’instrumentalisation» des ordres juridictionnels et des audiences expéditives, pour ne surtout pas se solidariser à la "Victoire" éphémère de Manuel Valls …Paul BIYA du Cameroun est de ceux-là, et s’est curieusement souvent targué d’être je cite: "le meilleur élève de la France". Concédons-le lui pour une fois, parce qu’il semble avoir particulièrement appris et retenu de ses «maîtres français», les rudiments de ce "rouleau compresseur administratif" aux apparences faussement judiciaires, qui permet à tout «Guide Suprême» de mettre la République à ses pieds.

C’est pourquoi cette République-là ne saurait être celle des combattants de la Liberté.

En démocratie le temps du Politique ne devrait pas être le même que celui du Juridique

Si Madame Daniele LOCHAK (Professeur émérite de Droit Public, Présidente d’Honneur du Gisti) a dû sortir de sa réserve habituelle…cela signifie effectivement que Manuel Valls est entrain de déboussoler de nombreux praticiens du droit (y compris ceux du syndicat de la magistrature, que personne ne peut raisonnablement suspecter la moindre complaisance ou connivence avec des thèses extrémistes)…

Se taire serait refuser délibérément d’éclairer le citoyen sur "le rôle politique du Juge administratif" en France, notamment celui du Conseil d’État, qui n’est hélas pas un magistrat de formation, mais un haut fonctionnaire généralement sorti de l’École Nationale d’Administration (ENA); donc pas suffisamment à l’abri des pressions dans des dossiers aussi sensibles comme celui-ci; où les responsables de l’Exécutif (et pas des moindres) ont "pris des risques" calculés et essentiellement court- termistes, sachant pertinemment que la Cour Européenne des Droits de L’homme pourrait logiquement ne pas suivre le Conseil d’État français.

Mais les délais de procédure et d’audience entre le Conseil d’État et la Cour Européenne des Droits de L’homme sont jugés suffisants par les responsables politiques socialistes (en pointe sur cette polémique), pour faire un matraquage médiatique à outrance sur la "victoire de leur république", et limiter les dégâts  dans les urnes (à voir!) aux échéances électorales intermédiaires.

C’est l’occasion de dire et redire qu’en démocratie, le temps du politique ne devrait pas être le même que celui du Juridique.


Joël Didier Engo

Sur le même sujet:

"Dieudonné, Valls et la liberté"

Par  Par Nicolas Gardères, avocat au barreau de Paris et docteur en droit public

http://www.liberation.fr/societe/2014/01/08/dieudonne-valls-et-la-liberte_971350

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