Bertrand Teyou, écrivain camerounais en exil en France: "compte tenu des contraintes insurmontables,
je demande très humblement à la France de se pencher sur mon droit de
retour au Cameroun, étant donné qu’elle en a créé les conditions par le
non-respect de ses engagements d’accueil".
A M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur:
Monsieur,
Je
souhaite, par la présente, solliciter une issue définitive à ma
situation. En effet, après avoir été emprisonné pour mes livres au
Cameroun, pays où j’avais ma maison d’édition, un lieu où écrire et
dormir, un toit décent pour ma petite famille, j’ai tout perdu et me
suis retrouvé comme réfugié politique en France, havre humanitaire où,
malheureusement, mon droit d’exercer se trouve gravement compromis.
Je
me retrouve dans un environnement professionnel où, malgré ma capacité
avérée de générer des revenus avec mon travail d’écrivain et mon respect
rigoureux des normes applicables, l’opportunité d’accès au marché
français du livre m’est férocement interdite. Après avoir exploré toutes
les pistes possibles en France pour me remettre en activité, je
constate que la réalité ne me laisse aucune chance quel que soient le
talent et l’investissement de soi.
En refusant avec encore plus
d’acharnement la diffusion sur son territoire des ouvrages qui ont
permis l’obtention de mon statut de réfugié politique, la France fait
comprendre que c’est bien elle qui a le plus intérêt que le carnage du
Cameroun ne soit point dénoncé, elle prouve par-là que mon engagement
littéraire est dans la nécessité d’une urgente révision de cible.
Alors, compte tenu des contraintes insurmontables, je demande très
humblement à la France de se pencher sur mon droit de retour au
Cameroun, étant donné qu’elle en a créé les conditions par le
non-respect de ses engagements d’accueil.
Je souhaite très rapidement me
remettre au travail. Les graves violations de la convention de Genève
de 1951 que je connais en France représentent le mépris le plus infâme
que peut subir un être humain, une réalité cynique par laquelle la
France réduit par ailleurs le destin de ses immigrés africains en
esclavage pour les papiers et le bonheur mensonger qui va avec. En
vivant de près le paradoxe de la France dite « pays d’accueil », la
France de la fabrique des crimes, en plongeant dans la froide entreprise
de la France humaniste qui familiarise ses immigrés africains avec
l’inacceptable, on comprend que la guerre avec nos dictateurs supposés
est une vaine bataille, on réalise, de la façon la plus complète, que le
seul ennemi de l’Afrique est la France néo coloniale.
Plutôt que de vivre en esclave chez vous, je préférerais vivre en
épave chez moi.
Je vous prie, dans le cadre du traitement de mon droit
au retour, de bien vouloir prendre en compte le fait que mon
emprisonnement au Cameroun et l’assassinat de ma fille de 7 ans partent
de la suspension arbitraire de la diffusion de mes livres par
Messapresse, société du groupe français Pressatlis qui a déclaré devant
le TGI de Paris avoir agi sur la base d’une loi qui n’a jamais été
produite, ces deux acteurs du marché du livre qui exercent au Cameroun
forts d’un mandat gouvernemental établi à partir de la coopération
existant entre l’Éducation nationale camerounaise et l’État français.
Vous voyez bien qu’en prenant du recul, on réalise que notre tragédie
est planifiée par la France, et que tout réfugié politique voulant rester
cohérent avec lui-même doit rapidement quitter le privilège
esclavagiste agité par l’ancien colon et rentrer au bercail pour faire
barrage au seul ennemi qui est l’imposture de l’Occident.
De ce pas, je vous remets ma carte de résidence et mon passeport pour
la conclusion de mon rapide retour.
Je quitte votre pays en espérant
pour lui que ses dirigeants comprennent que leur imposture n’a aucun
avenir, j’invite vivement ces derniers à réaliser qu’ils font mal non
seulement aux Africains mais aussi et surtout compromettent gravement
l’éclosion de la France merveilleuse.
Dans l’attente de
l’accomplissement des formalités de mon départ, veuillez croire,
monsieur le Ministre, à l’expression de ma profonde sincérité.
Bertrand Teyou, Écrivain
Toujours sur les violations des droits de l'Homme au Cameroun, notamment la répression des homosexuels:
Me Alice Nkom, l'avocate "pestiférée" militante en faveur de la dépénalisation de l'homosexualité au Cameroun : "La loi anti-homosexualité au Cameroun est une copie de celle qui figurait dans le code pénal du régime de Vichy."
http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAWEB20140404180513/
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