jeudi 11 juin 2015

Jean-Marie Le Guen: le degré zéro du raisonnement politique en matière d'immigration

 

Le degré zéro du raisonnement politique quand un membre éminent de la gauche dite libérale, veut afficher sa "fermeté" sur l'immigration, et flatter les plus bas instincts de l'opinion publique française. Cela donne:

Jean-Marie Le Guen à Cécile Duflot: «ben vous n'avez qu'à les accueillir (les migrants) chez vous !!!»

Monsieur Le Ministre autorisez-vous une petite escapade dans la circonscription électorale de Mme Duflot (11ème et 20ème arrondissement de Paris), et vous constaterez que des "migrants" récents peuvent bien vivre dans la dignité et en parfaite harmonie avec les habitants (de toutes les origines).

Ces hommes politiques dits décomplexés, qui se revendiquent comme des modernistes de gauche, en deviennent pathétiques.

Et dire que certains d'entre-nous les ont soutenu dans des campagnes internes et nationales, puis convaincu nombre de Français de leur accorder leurs suffrages il y a à peine 03 ans.

L'ivresse du pouvoir les a rattrapé plus vite que nous ne pouvions imaginer, et est littéralement entrain de les perdre à jamais.

Dommage!

Joël Didier Engo

La tribune de Mme Cécile Duflot, publiée dans le quotidien Le Monde le 10 juin 2015

«Au nom d’une certaine idée de la France, protégeons les migrants»




"Les questions se bousculent dans nos esprits incrédules. Pourquoi un tel acharnement contre de pauvres gens ?" (photo: Cecile Duflot le 7 avril à l'assemblée nationale).

En tant que président de la République, vous êtes le garant du respect des valeurs qui rassemblent notre nation citoyenne. J’ai eu l’honneur de siéger à la table du conseil des ministres sous votre autorité. Et si je n’ignore pas nos désaccords, je sais aussi que nous avons en partage une certaine idée du respect dû aux êtres humains.

C’est la raison pour laquelle je m’adresse à vous pour me faire l’écho d’un trouble qui monte au sein de la population, bien au-delà des clivages partisans, concernant la politique d’asile de notre pays. Dans ce domaine, nous devons être fidèles à nos engagements, à notre humanisme, et à nos valeurs.
Or, au moment même où l’actualité nous présente chaque jour les images des migrants cheminant au péril de leur vie dans des embarcations de fortune où ils sont entassés par de véritables mafias exploitant la misère du monde, la situation faite aux migrants anciennement installés à La Chapelle et désormais régulièrement dispersés par les forces de police est insupportable.

Pourquoi un tel acharnement ?

Qui sont-ils ? Nombre d’entre eux sont des personnes éligibles au droit d’asile, qui ont quitté leur pays pour se soustraire à des dangers avérés. Nous n’ignorons pas que leur ancien campement était insalubre et posait des problèmes en termes de santé publique et de sécurité. Mais depuis l’évacuation de ce campement, la situation a franchi un nouveau cap dans l’inhumanité de l’accueil de ces personnes.

Ils font désormais l’objet d’actions régulières et permanentes des forces de police à leur encontre. La dernière d’entre elles, rue Pajol, a conduit les forces de l’ordre, dont nul n’ignore la difficulté de la mission, à faire usage de la force pour disperser les migrants et leurs soutiens. La population de l’arrondissement a pourtant manifesté sa solidarité envers les migrants déplacés. En vain.
Avons-nous donc perdu et la tête et le cœur pour ne pas voir que nous faisons fausse route ?
Les gaz lacrymogènes alors utilisés blessent la conception que nous avons de notre pays. Les images de migrants embarqués de force dans des rames de métro sont sinistres. Les cris de révolte et d’incompréhension n’ont pas pu ne pas parvenir jusqu’à vous, Monsieur le Président. Les questions se bousculent dans nos esprits incrédules. Pourquoi un tel acharnement contre de pauvres gens ?

Comment ignorer le périple qui fut souvent le leur pour parvenir sur notre sol ? Pourquoi ne pas avoir anticipé la situation ? Pourquoi ne pas dire la vérité sur l’insuffisance de nos capacités d’hébergement, que je connais bien, en tant qu’ancienne ministre du logement ? En matière de maintien de l’ordre, comment ne pas voir que les troubles engendrés par ces évacuations sont bien pires que les maux qu’ils prétendent conjurer ? Quel en est donc le sens ?

Waterloo moral

Qu’il me soit permis un mot plus partisan. Toute la gauche a en mémoire les tristes événements de 1996, quand la droite au pouvoir n’hésitait pas à pourchasser les migrants jusque dans les églises. Nous ne pensions pas alors que le désarroi et la colère qu’ils nous faisaient ressentir, nous les ressentirions un jour sous un gouvernement de gauche.

Avons-nous donc perdu et la tête et le cœur pour ne pas voir que nous faisons fausse route ? A force de professer un pseudo-pragmatisme, nous ne réglons pas les problèmes concrets et nous perdons la bataille des valeurs. Notre politique des migrations est un Waterloo moral.

Cessons d’être tétanisés par l’influence de l’extrême droite dans le champ politique. Elle se nourrit d’abord de nos reculs, de notre consentement à l’inacceptable et de notre inaptitude à redonner un sens au fracas du monde. Les migrants ne viennent pas de nulle part. Ils sont les fruits des soubresauts de notre planète. Penser que nous pouvons nous soustraire au monde commun en construisant une Europe forteresse est un mythe excluant, un mensonge halluciné, une fiction dangereuse.

L’exil économique fait peur ? Le droit d’asile est en berne ? Que ferons-nous demain des réfugiés climatiques ? Les questions sont indissolublement liées, vous le savez. La lutte contre la corruption et le mal-développement, la bataille contre le djihadisme, l’engagement contre le réchauffement climatique sont autant de batailles à mener conjointement pour un ordre du monde plus juste.

Les humanistes doivent relever la tête, afin que la folie de politiques migratoires indécentes et mortifères soit entravée
Il est grand temps de résister au vent mauvais de la xénophobie qui souffle sur tout le continent européen et inspire de bien mauvaises solutions aux gouvernants. Monsieur le Président de la République, j’en appelle donc à vous, à votre autorité et à votre humanité. Vous avez, dans l’immédiat, le pouvoir de régler la situation des migrants de Pajol. Agissez avec discernement, célérité, sagesse et détermination.

Au-delà de la question du droit d’asile, en vérité, c’est la question de l’accueil de l’étranger qui est posée. Le moment du courage est venu. Les humanistes doivent relever la tête, afin que la folie de politiques migratoires indécentes et mortifères soit entravée.

Une autre politique de l’immigration, à la fois responsable et cohérente avec nos valeurs, est possible. Ce n’est pas à l’extrême droite d’imposer ses fausses solutions en polarisant l’ensemble du débat public. C’est à vous, Monsieur le Président, qu’il revient de faire entendre votre voix pour ouvrir une autre voie.
Au nom de la justice, des droits de l’homme et de la France, enclenchez un nouveau cycle politique en France et en Europe, en jetant les jalons d’une nouvelle politique de l’immigration, plus juste, plus réaliste, et plus conforme à notre histoire.

Cécile Duflot (Députée EELV, ancienne ministre du logement)


Migrants: l'Elysée entre silence, contradictions et ligne droitière

  Par Lénaïg Bredoux, Médiapart 11 juin 2015

Les expulsions en plein Paris soulignent la ligne droitière du gouvernement et la tétanie d'une partie de la gauche face à ces sujets jugés inaudibles dans une part grandissante de son électorat. François Hollande a commandé un plan pour l'hébergement d'urgence des migrants.

Après Leonarda, La Chapelle. L’expulsion violente des migrants sur le parvis de la Halle Pajol, lundi à Paris, renvoie la gauche au pouvoir à ses contradictions. Ou plutôt à ses silences. Très peu de voix se sont élevées depuis pour critiquer la démesure de l’action des forces de l’ordre, et rappeler le gouvernement aux principes d’accueil et d’asile dont le PS se fait de moins en moins le porte-voix.

La tribune de l’ancienne ministre du logement Cécile Duflot a pourtant directement interpellé le président de la République. « Les cris de révolte et d’incompréhension n’ont pas pu ne pas parvenir jusqu’à vous, Monsieur le président. Les questions se bousculent dans nos esprits incrédules. Pourquoi un tel acharnement contre de pauvres gens ? » a écrit l’élue écologiste dans Le Monde. Avant de rappeler un épisode signifiant pour toute la gauche, l’évacuation de l’église Saint-Bernard sur ordre de Jean-Louis Debré en 1996 : « Toute la gauche a en mémoire les tristes événements de 1996 quand la droite au pouvoir n’hésitait pas à pourchasser les migrants jusque dans les églises. Nous ne pensions pas alors que le désarroi et la colère qu’il nous faisait ressentir, nous les ressentirions un jour sous un gouvernement de gauche. » Duflot conclut par ces mots : « Le moment du courage est venu. Les humanistes doivent relever la tête, afin que la folie de politiques migratoires indécentes et mortifères soit entravée. »

Ils ont été bien peu à répondre à l’appel. Au PS, seul Claude Bartolone, le président de l’Assemblée nationale, a fait entendre sa petite musique : dans un billet publié sur son blog, le candidat aux prochaines régionales en Ile-de-France prévient que « nous avons le devoir de dire clairement que la multiplication des barrières n’a jamais empêché ni réduit les flux migratoires. En le croyant et en le laissant croire, nous cherchons tout juste à nous rassurer et à nous dispenser d’une réflexion globale ». « C’est une simple réalité géographique, la France est sur la route de la Méditerranée vers l’Europe du Nord », rappelle l’ancien président du conseil général de Seine-Saint-Denis.

Il se dit favorable à l’ouverture de centres d’accueil – et pas seulement dans son département. « Regardons la réalité telle qu’elle s’exprime depuis plus d’une décennie à Sangatte : la destruction du centre d’accueil n’a absolument rien réglé. Au contraire : ont ressurgi des lieux indignes qui existent du simple fait de notre déni de la réalité. Je le répète : il ne s’agit pas d’élargir les conditions d’accès à l’asile. Mais chaque homme a le droit d’être traité en tant qu’homme. Nous devons être en mesure de proposer des accueils d’urgence et de les assumer sans hypocrisie sur tout notre territoire régional, sans que certains ne se défaussent une fois de plus », écrit encore Bartolone.

Face à la polémique soulevée par l’intervention des forces de l’ordre lundi – plusieurs élus ont été malmenés, dont un conseiller communiste, Hugo Touzet –, la maire de la capitale Anne Hidalgo a fini par appeler à la création d’un centre d’accueil. À Paris ou « à proximité de Paris ». Une proposition défendue de longue date par EELV à Paris : « Il faut ouvrir un centre d’accueil et d’hébergement collectif qui permette l’accès au droit et gérer les flux migratoires de façon humaine et efficace », explique le coprésident du groupe écologiste David Belliard.

« Il faut ouvrir un centre, un lieu : les migrants qui arrivent qui ne savent pas où ils vont demander l’asile, ils ont besoin de se poser quelques jours, pour prendre cette décision, accompagnés par les associations qui veillent au respect des droits, pour une durée d’une quinzaine de jours », a indiqué Anne Hidalgo mardi sur BFM TV. Une proposition qui ressemble à l’ouverture de « maisons d’asile » partout en France, destinées à informer les migrants sur leurs droits, défendue par plusieurs spécialistes de l’immigration écoutés à Matignon.

Mais la plupart des dirigeants socialistes ont préféré s’en prendre à Cécile Duflot et à ceux qui « instrumentalisent » les migrants (d’EELV à l’extrême gauche, en passant par certaines associations). Une stratégie usée jusqu’à la corde par la droite, que le gouvernement n’a pourtant pas hésité à reprendre à son compte. Ainsi, le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve a fustigé, mardi lors de la séance des questions à l'Assemblée nationale, la « démagogie » et l’« irresponsabilité de ceux qui critiquent la politique du gouvernement ».
C’est le secrétaire des relations avec le parlement, le très vallsiste Jean-Marie Le Guen, qui a été le plus virulent. « Personne n’imagine qu’il y ait un nouveau Sangatte dans Paris. À moins que madame Duflot, qui est députée de Paris, ne propose tout simplement que dans sa circonscription, on regroupe tous les immigrants qui sont aujourd'hui dans les rues », a-t-il déclaré sur Europe 1. Avant d’estimer que les violences des forces de l’ordre lundi à Paris étaient un « épiphénomène ».

Une réunion mercredi à l'Elysée

En réalité, au sein du PS, trois sensibilités sont encore représentées : ceux qui pensent qu’il faut surtout afficher la « fermeté » (Valls, Le Guen), ceux qui estiment encore que la gauche doit avoir une autre politique migratoire que la droite (ils sont de moins en moins nombreux) et ceux qui oscillent entre les deux et ne savent pas trop quoi penser. Le discours de Jean-Christophe Cambadélis, dimanche en clôture du congrès de Poitiers, en était une nouvelle illustration en appelant à un «traitement républicain de l’immigration», dont on ne sait pas très bien ce qu’il signifie.

Depuis lundi, plusieurs militants ou élus de base socialistes ont bien sûr protesté : Bastien Recher, adjoint au maire du XIe arrondissement, a par exemple publié un communiqué jeudi pour dénoncer les violences policières et les propos de Jean-Marie Le Guen. «J’ai fait campagne en 2012 pour faire gagner la gauche, changer les politiques migratoires et mettre fin aux pratiques indignes mises en place du temps de Nicolas Sarkozy. (…) Les invectives d’un ministre de la République contre une députée, mais aussi contre l’ensemble des électeurs de sa circonscription, sont indignes», écrit-il.

Mais la ligne publique de l’exécutif se résume bien souvent aux coups de menton de Manuel Valls. Une part grandissante du PS est convaincue que la «bataille culturelle est perdue», dixit un élu francilien, et que la «droitisation» de l’opinion contamine peu à peu les rangs des électeurs socialistes. Une analyse déjà entendue sur les Roms (« si vous saviez ce que nos électeurs disent des Roms » est une phrase devenue banale chez les élus socialistes). « L’opinion publique est hystérisée sur ce sujet, estime ainsi un proche du premier ministre, cité jeudi par Libération. Nous devons être sur le registre de la force sinon les Français nous le reprocherons, mais nous devons aussi trouver le moyen de faire participer ces migrants à notre destin national. »

« Aujourd’hui, le débat politique français est tétanisé par rapport à ce que dit l’extrême droite sur le sujet. On voit la droite courir derrière le FN et la gauche qui n’ose plus rien dire et n’est même plus capable de rappeler quelques principes », explique un dirigeant de la majorité. « Même à Paris, tout le monde semble tétanisé. On se contente d’une réponse comptable en récitant le chiffre des offres de relogement, mais sans voir la question politique monter », abonde un élu de la capitale.

« Bernard Cazeneuve a parlé de manipulation par des acteurs politiques, ça peut exister – les migrants ne vont pas d’eux-mêmes à Saint-Bernard – mais répondre sur ce terrain-là, c’est se priver d’aborder le sujet au fond, alors que par ailleurs le ministre va dans le bon sens », estime aussi Christian Paul, député et chef de file des ailes gauches du PS. « Si les choses étaient prises au sérieux, de façon plus solidaire, plus en amont, ça ne passerait pas comme ça », dit-il, avant de renvoyer vers la tribune écrite par sa sensibilité avant le congrès du PS.

« Le débat public balance entre les fuites d’un rapport erroné de la Cour des comptes sur l’asile, dans Le Figaro, et les diatribes d’une partie de la gauche estimant qu’on ne fait rien pour les migrants. Cette oscillation permanente entre le repli et le masochisme complique toute politique publique sur l’asile », tempère un socialiste spécialiste de l’immigration, sous couvert d’anonymat, convaincu que le gouvernement a pris les bonnes mesures avec la loi asile notamment. Il rappelle également que le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve s’est rendu à Calais et a conseillé, devant les caméras, à un migrant de demander l’asile en France. Jeudi soir, il a également visité un centre d'accueil, à Nanterre, où plusieurs places étaient réservées pour les réfugiés livrés à eux-mêmes en plein Paris.

Une partie de l'exécutif est profondément exaspérée par les polémiques relayées par une partie de la gauche, ou de l'extrême-gauche, et estime que les solutions proposées depuis plusieurs jours à Paris sont la preuve de leur volonté à faire respecter le droit - notamment le droit d'asile. « Pour une fois qu'on est de gauche, soupire un conseiller ministériel. Il y a un décalage entre la rhétorique gouvernementale sur la responsabilité et la fermeté, portée par Valls, et la réalité des faits. »

Lors d’une réunion organisée dans la foulée du conseil des ministres mercredi, le président de la République, entouré de Manuel Valls et des ministres de l’intérieur, des affaires sociales et du logement, a également évoqué le sujet. Selon l’Élysée, François Hollande a mandaté Bernard Cazeneuve et Sylvia Pinel (ministre du logement) pour préparer «un plan sur l’hébergement». « Il ne s’agit pas de créer des centres pour les migrants mais de permettre leur accompagnement individuel. Il faut faire face à un afflux de migrants, avec rigueur, humanité et attention, mais il ne s’agit pas d’avoir une action globalisante», explique-t-on au Palais. Deux réunions ont déjà eu lieu, une troisième est prévue vendredi. Ces propositions devraient être remises courant juin.

Lénaïg Bredoux, Médiapart 11 juin 2015


Sarkozy sans tabous sur le droit du sol, Le Figaro Premium 15/06/2015
Nicolas Sarkozy lors d'une rencontre avec les nouveaux adhérents des Républicains, samedi à Paris

La teneur de mon commentaire d'abord supprimé puis (re)publié au Figaro:

"Et on remet ça...Eh ben rien n'est tabou Monsieur Le Président!...L'on pourrait presque parier que dans 20 ans le débat politique hexagonal portera encore et toujours sur ce sujet, qui visiblement obsède des générations successives d'acteurs politiques, au point de leur faire passer à côté de l'essentiel: la place de la France dans un monde qui se dessine progressivement avec les étrangers et souvent à l'étranger, tragiquement sans elle."

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