mardi 27 octobre 2015

ZYED et BOUNA, DIX (10) ANS APRÈS...ON N'OUBLIE PAS!!

Emmanuel Todd : "Le vrai 'grand remplacement', c'est celui des générations"

Par l'OBS,

 Emmanuel Todd. (Iannis Giakoumopoulos pour

Ils sont ministre, élu, avocat, ex-star du foot, grand frère d'un des adolescents électrocutés ou jeune ayant participé aux émeutes de 2005 : ils nous ont confié leurs souvenirs de ces événements.

27 octobre 2005, Clichy-sous Bois. Zyed Benna, 17 ans, et Bouna Traoré, 15 ans, meurent électrocutés après une course-poursuite avec la police. Le ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, prétend alors que les enfants sont des voleurs. A tort. Les amis des adolescents, leurs voisins, la jeunesse des quartiers populaires, ripostent par des émeutes qui, comme une traînée de poudre solidaire, se propagent à des centaines de villes partout en France.

Les images de voitures enflammées, d'Abribus couchés, de CRS en faction et de jeunes encapuchonnés font le tour du monde. La France apparaît comme un pays en guerre civile. Le gouvernement décrète l'état d'urgence. Plus de 6.000 personnes sont interpellées, 30 communes instaurent un couvre-feu.

Dix ans après, que reste-t-il de ces affrontements? La justice a relaxé les policiers. Des personnes ont été, par leur fonction, leur histoire ou le hasard, touchées au plus près. L'intellectuel Emmanuel Todd se souvient.

* * *

C'est un des "actes civiques" dont il est "le plus fier". En 2005, Emmanuel Todd, historien, anthropologue et démographe, a pris la parole comme on fait son devoir, pour dire que ces émeutes étaient "une aspiration à l'égalité. Les jeunes ethniquement mélangés de Seine-Saint- Denis s'inscrivent dans une tradition de soulèvement social qui jalonne l'histoire de France". Dix ans plus tard, l'intellectuel avoue toutefois une "erreur" dans son jugement de l'époque:
J'étais sûr que Nicolas Sarkozy, responsable de cette flambée de violence dans les banlieues, allait payer en tant que ministre de l'Intérieur. Ces émeutes m'avaient plutôt rempli d'espoir...

En réalité, elles ont marqué le début du moment où politiques et idéologues allaient être récompensés pour le fait d'agresser la banlieue et les jeunes."
Il ajoute : "L'effet fondamental de ces événements a été de crisper un corps électoral vieux. La société française accouchait d'une gérontocratie de masse. Certains ont voulu voir des problèmes ethniques dans ce qui était en fait un affrontement entre personnes âgées et jeunes. Les violences de 2005 marquent le soulèvement raté de la jeunesse et le succès de Nicolas Sarkozy, l'élu le plus soutenu par les gens âgés dans toute l'histoire de la droite: 44 % des plus de 65 ans ont voté pour lui en 2007", poursuit l'intellectuel.
Les sexagénaires reprochent aux jeunes d'être arabes, musulmans ou rappeurs, comme ils accusaient leurs enfants dans les années 1960 d'avoir les cheveux longs et d'aimer la pop anglo-américaine."
Selon lui, "ce que les gens rejettent, c'est l'idée même d'une France nouvelle. Le problème ne se résoudra pas au terme d'une violente lutte idéologique. La solution est démographique: nous sommes de vieux hégémoniques, mais nous allons disparaître. On peut toujours trouver en soi-même une raison de refuser le passage du temps et le remplacement des générations. Le vrai 'grand remplacement'." 

Elsa Vigoureux et Gurvan Le Guellec

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