Le Monde
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Par Maryline Baumard
École: les filles réussissent bien voire mieux, les garçons moins bien
De manière générale, les résultats sont nettement moins bons pour les garçons. Si 59 % des garçons de la population majoritaire sont bacheliers, seuls 48 % des enfants d’immigrés réussissent ce diplôme – 26 % seulement pour les parents originaires de Turquie, 40 % pour l’Afrique sahélienne ou 41 % pour l’Algérie.
Globalement, 55 % des descendants d’immigrés (ou immigrés arrivés avant 6 ans) qui sont aujourd’hui bacheliers. Ce qui place les deuxième génération, filles et garçons confondus, à 7 points des adolescents du groupe majoritaire, pour l’obtention de ce diplôme tellement symbolique. D’autres preuves du parcours d’intégration peuvent se lire ailleurs, comme dans les mariages mixtes qui concernent 67 % des fils de migrants et 62 % des filles, ou encore dans la descendance des deuxième génération, équivalente à celle des femmes de la population majoritaire à 40 ans.
Emploi : l’ascension sociale ne protège plus des discriminations
« Ayant plus de mal à s’insérer dans le monde du travail, ils acceptent plus souvent des postes déqualifiés et ensuite y progressent moins vite que leurs collègues qui ne sont pas issus de l’immigration », regrette la sociologue. « Les enfants d’immigrés sont partout confrontés à des discriminations. Ce qui est vrai dans la recherche d’un emploi l’est aussi pour le logement ou l’accès aux loisirs », insiste-t-elle. « En fait, eux font le travail d’intégration. Mais quand la dynamique doit venir de la société française, là, les blocages apparaissent », regrette Patrick Simon.
La seconde génération souffre plus que la première des discriminations et cette expérience est d’autant plus systématique qu’ils font partie des minorités visibles. Maghrébins, Turcs et Subsahariens en sont le plus souvent victimes. Et rien ne les protège : ni le mariage mixte ni l’ascension professionnelle. Au contraire. « Alors que le couple mixte est souvent conçu comme un indicateur d’intégration, les migrants et leurs enfants qui ont fait le choix de vivre en couple avec une personne de la population majoritaire subissent dans leur quotidien davantage de racisme », précisent les chercheurs, qui ajoutent que « les cadres immigrés sont significativement plus confrontés au racisme que toutes les autres catégories socioprofessionnelles ».
Le phénomène est assez prégnant pour qu’entre 5 % et 9 % des descendants d’Africains et de Maghrébins déclarent avoir subi dans les cinq dernières années du racisme et des discriminations sur leur lieu de travail. Chez les enfants d’immigrés européens, ils sont 1 % comme chez les descendants de l’Asie du Sud-Est. Ce qui explique peut-être que l’émergence de cadres soit un processus lent au sein de certaines communautés. Dans la population générale, 1 actif sur 5 a ce statut ; chez les enfants de migrants européens installés en France, 1 sur 3 peut s’en prévaloir, contre seulement 8 % des Maghrébins.
Zones urbaines sensibles : les hommes relégués dans des quartiers fuis par d’autres
Quand plus d’un habitant de ZUS sur deux est migrant ou fils de migrant, ils se retrouvent vite ghettoïsés et victimes de ce que le premier ministre, Manuel Valls, qualifiait en janvier 2015 d’« apartheid territorial, social, ethnique ». « Nous souhaitons attirer l’attention sur ce groupe », insiste M. Beauchemin, pour qui leur présence aux marges de la société, désormais scientifiquement établie, est « un fait social majeur ». Pour eux et pour les autres, Christelle Hamel, Patrick Simon et Cris Beauchemin plaident à l’unisson pour la mise en place de politiques de lutte contre le racisme et les discriminations, afin de ne pas « stopper ce processus d’intégration, en marche, par ces assignations aux origines de leurs parents ».
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Maryline Baumard
Journaliste Pour trouver un emploi en France, mieux vaut ne pas être issu de l’immigration
Le Monde | 18.02.2016-
Pour trouver un emploi en France, mieux vaut être un homme et ne pas être originaire du continent africain, selon une étude de France Stratégie publiée jeudi 18 février. « Les hommes sans ascendance migratoire ou d’origine européenne restent significativement avantagés sur le marché du travail », relève cette enquête.
« A caractéristiques égales, ils ont un accès privilégié à l’emploi, notamment au CDI à temps plein et ils bénéficient de salaires plus élevés », poursuit France Stratégie, organisme de réflexion rattaché à Matignon, qui s’est penché sur les inégalités « inexpliquées » sur le marché du travail, en fait, imputables en partie à la discrimination (origine, sexe, résidence).
Dans le détail, le taux de chômage chez les personnes originaires du continent africain est de 18 % pour les hommes et 13 % pour les femmes. Chez les hommes et femmes sans ascendance migratoire, il est à 6 %. Avec une ascendance européenne, le taux passe à 6,5 % pour les femmes et 6,6 % pour les hommes.
Salaires plus faibles
Les hommes sans ascendance migratoire ou d’origine européenne sont mieux lotis que les hommes originaires des régions d’outre-mer (Guyane, Martinique, Guadeloupe, Réunion) et du continent africain, Maghreb compris, dont les salaires sont plus faibles, le « sur-chômage important » et l’accès aux postes les plus rémunérés « moindre ».
En outre, quelle que soit l’origine, les hommes ont plus de chances que les femmes d’accéder aux 10 % des salaires les plus élevés. Ces dernières « restent perdantes sur de nombreux tableaux : elles ont un taux d’activité plus faible, des salaires inférieurs à poste donné et un accès difficile aux postes les mieux rémunérés », souligne l’étude. De manière générale, les femmes rencontrent plus de difficultés à trouver un emploi que les hommes, même en étant davantage diplômées.
Parmi les personnes travaillant à temps partiel, les écarts en fonction des origines s’effacent sensiblement, avec un taux de chômage de 4 % pour les hommes sans ascendance migratoire (7 % pour les descendants d’immigrés Afrique-Maghreb) et de 28 % pour les femmes de la même catégorie (29 % pour les descendantes d’immigrés Afrique-Maghreb).
L’enquête se base sur une étude de l’Insee portant sur un échantillon de 22,7 millions de personnes interrogées entre 1990 et 2014 en France métropolitaine. Elle porte sur des individus nés en France et âgés de 25 à 59 ans, dont 90 % n’ont aucun parent immigré ou né dans les régions d’outre-mer ; 1 % sont natifs des régions d’outre-mer, 5 % descendants d’immigrés européens et 4 % d’immigrés africains y compris le Maghreb.
Écarts de probabilité d'être en emploi (en points de pourcentage)
Femme sans ascendance migratoire directeHomme né dans les DOMFemme née dans les DOMHomme descendant d'immigré Afrique-MaghrebFemme descendant d'immigré Afrique-MaghrebZUSEcarts de probabilité d'être au chômage (en points de pourcentage)
Femme sans ascendance migratoire directeHomme né dans les DOMFemme née dans les DOMHomme descendant d'immigré Afrique-MaghrebFemme descendant d'immigré Afrique-MaghrebZUS
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